Collioure : retour à l'Ambroisie



 

A Collioure, une fois visitée l'église Notre Dame des Anges et son impressionnant rétable du maître autel, on devra sans risque ni regret fuir le Boulevard du Boramar. Même si on peut, sans déchoir, s'arrêter y boire un verre d'à peu près n'importe quoi face à la mer et au clocher / phare. Mais on ne prendra pas plus qu'un verre : là se trouve en effet le royaume de l'entrecôte frites (surgelées, les frites) et de l'odeur de crustacés recuits.
Pour qui souhaite manger, manger vraiment, le salut viendra du contournement du Château Royal : longeant la mer, on arrivera à un quartier un peu moins fréquenté. C'est là : Place Jean Jaurès, que se niche l'Ambroisie.
C'est à l'écart, et c'est dommage car le lieu mérite d'être vu et fréquenté !
D'autant plus que ce ne doit pas être facile de s'implanter, à Collioure comme ailleurs, quand on a un projet ambitieux (et on peut le regretter mais c'est ainsi : vouloir faire bon est - au moins en restauration - un projet ambitieux) et qu'on sort des sentiers battus .... tant pour la zone de chalandise que pour la carte des mets !
Bref : c'est un beau projet l'Ambroisie !
C'est un beau projet qui consiste à proposer à des prix comparables à ceux qui se pratiquent de l'autre côté du Château des plats qui, eux, n'ont rien à voir ! Car ici non seulement les produits sont frais, mais en plus ils sont travaillés justement, honnêtement et avec précision.
Il y a un an, tombant dessus par hasard j'y avais fait une agréable halte le soir même : l'endroit, l'accueil et les plats m'avaient enchanté.
Depuis, l'Ambroisie a changé de mains mais l'accueil y est resté irréprochable. J'ne veux pour première preuve que le choix musical et son volume sonore au sortir de la salle me laissant perplexe il n'y a pas eu de difficulté à changer de table pour migrer au bout de la petite et agréable terrasse. Là, côté son, plus de souci ... même si nous avons eu, en cours de repas, une visite inattendue qui nous a fait profiter de la version manouche de "
Comme d'habitude". Personnellement je préfère celle des Sex Pistols (mais pas au restau).
Même si, ce genre d'exercice peut par lui même - s'il est répété et prévisible - justifier la visite au lieu, quoiqu'il en soit de l'intérêt de la performance : il vaut mieux venir pour les assiettes.
D'autant que les assiettes en valent largement la peine !

Ce soir là, en entrée, je suis allé vers "Celle du Jardin" : belle et bonne salade jouant sur les contrastes et complémentarités. Dès l'arrivée du plat le travail des couleurs et des formes est très ludique et attractif. Le jeu continue avec brio avec les textures lorsque l'on passe de la courgette crue à la tomate ou à l'aubergine joliment cuite ou aux oignons violets confits. Entre autres. Il en va de même avec les saveurs qui se chevauchent et se répondent, agréablement soutenues par la sauce légère et sa pointe de coriandre.
Pour les plats : beau et bon poisson du jour qui sortait quasiment de l'eau pour bénéficier de la cuisson qui va bien (chair délicieusement savoureuse). Service impeccable ... et il vaut mieux quand le poisson est servi à l'ardoise.
Noter que, par ailleurs, le Cabillaud s'accompagnait d'une intéressante et savoureuse crème fenouil / citron.







Pour finir : une irréprochable interprétation du fraisier.
Nota : forcément la nuit finit toujours par tomber, même tard. En conséquence, mes habituelles photos piteuses - l'iPhone n'est pas toujours le bon moyen : c'est une excuse, mais pas que - deviennent encore plus piteuses quand la lumière fait défaut. Elles ne rendent donc pas justice à l'esthétique des plats.

Mais c'est un blog vins, alors les vins ?



La carte des vins est courte car resserrée sur quelques belles bouteilles exclusivement locales : il y a une vie loin de Bordeaux ou de la Bourgogne ... une belle vie quand elle s'accompagne des quelques références croisées sur la carte (de
Bizeul à Pithon en passant par La Préceptorie ou La Rectorie, Piétri Géraud, Le château de Jau et quelques autres encore ...).
Une carte où les tarifs sont plutôt sages (à partir de 15 € la bouteille sur table), et d'autant plus sages que la plupart des vins sont disponibles au verre.

Ce soir là c'est une bouteille entière qui s'est fait sécher : le Coume Marie (2014) de La Préceptorie.
Sa robe tend vers une nuance d'un jaune légèrement évolué, mais au nez comme en bouche on trouve un bel équilibre entre la fraîcheur et un poil d'élevage.
Notes de fleurs blanches très aériennes associées à la maturité de la pêche. Un soupçon de pomme verte témoigne probablement d'un début d'évolution mais cela ajoute à la complexité sans nuire à la fraîcheur du vin.
Il en va de même en bouche où fraîcheur et minéralité s'équilibrent avec le gras du vin et les légères notes d'élevage.
Beau vin bien balancé pour une soirée comme j'en veux bien à chaque fois, avec des gens à l'écoute, prêts à partager leur amour du produit avec passion mais sans être ni envahissants ni ronflants.
Il faut y aller !
Vraiment.
Menus à 27 (on y trouve, entre autres, le Cabillaud à la crême fenouil / citron) et à 36 €.
A la carte, côté tarifs c'est un ton à peine au dessus : 11 € pour "
celle du jardin" et 20 € pour le beau poisson.
Enfin, c'est au dessus ... surtout si on prend un dessert. Et on n'est pas obligé de prendre un dessert. Jamais.
Mais ils sont beaux les desserts, alors moi j'en ai pris un.

La quille de
Coume Marie était à 32 € sur table, et le déca je sais pas : on me l'a offert.




Après on pourra dormir à la Casa Païral. Idéalement placée, le jardin y est toujours aussi accueillant et le calme absolu (la fontaine s'arrête, le soir : ça fait plaisir aux pigeons qui peuvent alors y boire).
Comme les pigeons dans la fontaine, on peut nager dans la piscine (jusqu'à 21h) et, sur le chemin, relever les maximes et proverbes qui parsèment les murs.

J'aime cet endroit.


Et j'aime 
Collioure.
Car
Collioure, c'est toujours aussi beau (même quand on sait pas faire les photos, surtout avec un iPhone).





Pour finir : dans ce billet, je suis tellement consensuel et ravi que, pour ne pas brusquer mes rares lecteurs, je me sens presque obligé de préciser que j'ai intégralement payé tant le restau que l'hôtel et qu'on ne m'a donc ni demandé ni forcé à autant dégouliner de bonheur.
Je sais : c'est insupportable, le bonheur.



L'ambroisie
3 Place Jean Jaurès
Collioure

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